Haut-Karabakh : une enquête préliminaire ouverte par la France
Depuis le 27 septembre dernier et le début du conflit opposant l’Azerbaïdjan et l’Arménie pour récupérer le Haut-Karabakh, après trente ans de négociations infructueuses sous l’égide du groupe de Minsk et du droit international, Bakou avait alerté la communauté internationale sur le départ de dizaines de combattants franco-arméniens sur le théâtre de guerre, en vue de défendre l’armée d’occupation arménienne. Le tout en dehors de toute légalité.
Alors que d’une part, il est strictement interdit à des citoyens lambda d’aller combattre pour le compte d’une armée étrangère, et que d’autre part nombre de ces individus partis défendre le régime séparatiste sont déjà des profils sensibles en partie fichés S en France, Erevan n’a pas cru bon de se prémunir d’une telle violation de la règlementation internationale. Par le jeu de la coopération judiciaire internationale, le pays aurait dû les refouler immédiatement à l’entrée du territoire. Car dans le contexte international sensible de lutte contre le terrorisme, et alors que la France a malheureusement dû faire face à une nouvelle vague d’attentats ignobles, les services français doivent faire avec près de 10 000 individus fichés pour radicalisation djihadiste qu’il est impossible de surveiller mais pas uniquement : ce fameux fichier concerne tous les types d’engagements violents sur tout le spectre politique de l’ultra-gauche à l’ultra-droite. Parmi eux donc, des dizaines de combattants nationalistes, soutenant l’Arménie, plutôt d’extrême-droite, sont bien partis en septembre dernier défendre le régime séparatiste et soutenir l’armée d’occupation. Le tout accueillis dans un premier temps dans la capitale arménienne puis acheminés sur le théâtre des opérations.
Maintenant que la paix a été signée entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, sous la médiation de la Russie, il est temps de construire la paix mais il est fondamental déjà de dénoncer les crimes de guerre qui ont pu être perpétrés directement ou indirectement par l’Arménie. Aujourd’hui, il est clair que l’Arménie a un passé avec le terrorisme qui ne doit pas reprendre, à travers l’engagement de nouveaux combattants binationaux assoiffés de vengeance après la signature du traite du 10 novembre dernier rétrocédant le Haut-Karabakh à Bakou. Malheureusement, on se souvient tous que de nombreux attentats terroristes avaient été perpétrés par l’Armée secrète de libération de l’Arménie, la fameuse ASALA, dont celui en France commis à l’aéroport d’Orly le 15 juillet 1975, et qui avait fait huit morts et près de 80 blessés.
Il y a un risque aujourd’hui, pour la France, et le Ministère de l’Intérieur en a enfin pris conscience, d’envenimement et de danger pour l’hexagone si les combattants français partis combattre sous les couleurs du drapeau arménien reviennent sur le sol français en toute impunité. En effet, si elle ne fait rien, des violences entre la communauté des Arméniens qui représente 600.000 individus, et celle des Azerbaïdjanais qui sont environ 4000 et celle des Turcs 700.000, sont plus que possibles, si ces combattants violents parviennent à rentrer sans être appréhendés par la justice à leur retour.
C’est pour cela, que l’Ambassade d’Azerbaïdjan en France, a saisi dernièrement la justice française avec des preuves, afin de pousser à l’ouverture d’une enquête pour crimes de guerre commis par des citoyens français d’origine arménienne, partis se battre dans la région du Haut-Karabakh depuis des semaines. Elle a également saisi le Procureur de la République pour qu’une enquête soit ouverte, que ces individus soient jugés, et qu’ils ne représentent plus de dangers ni dans le Caucase ni pour la France à l’avenir. Finalement, une enquête préliminaire vient donc d’être ouverte par la justice française : alors que l’avocat de l’Azerbaïdjan dans cette histoire a déjà confondu un certain nombre d’individus suspects, la police aux frontières de l’hexagone, elle, est en train de passer au crible tous les passagers voyageant actuellement depuis Erevan vers la France afin de les interroger au plus vite sur les motivations de leur séjour sur place.
Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient relations euro-arabes/ terrorisme et radicalisation, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du CECID (Université Libre de Bruxelles), de l’OMAN (UQAM Montréal) et de SAVE BELGIUM (Society Against Violent Extremism)